– Qu’est-ce que t’en penses?

–…

– En tout cas, moi je dirais : c’est beau, c’est l’fun, mais ça pue et ça goûte pas bon.

– Ah non là! Tu exagères! Ça ne pue pas tout le temps et ce n’est quand même pas dégueu!

– Non. Ça ne pue pas tout le temps, mais vraiment souvent. Et tu ne diras pas que tu as raffolé de la gastronomie birmane! Je pense qu’on n’a jamais mangé autant de spaghetti en aussi peu de temps!

– Ouais… c’est vrai que toutes les occasions ont été bonnes pour se sauver des spécialités locales. Mais quand même, résumer un mois au Myanmar par « ça pue et ça goûte pas bon », tu exagères.

– Ben non! J’ai d’abord dit que c’était beau et l’fun. Tu sais bien que j’ai adoré mon séjour en Birmanie, notamment parce que les Birmans sont probablement les gens les plus souriants que j’ai rencontrés de ma vie. Mais l’absence de système d’égout, les feux de poubelles à chaque coin de rue, les maudits p’tits poissons séchés qui sentent la mort et qu’ils mettent partout et dans tout font aussi partie de l’expérience. Mais toi, tu résumerais comment le dernier mois?

– Je dirais que la nourriture manque de variété et de goût malheureusement. Je dirais qu’il y a des moines, des stupas et des temples à tous les coins de rue, mais aussi des églises et des mosquées. Je dirais que les chants religieux sont omniprésents; qu’étrangement, les logements sont un peu chers. Je dirais que nous avons bien fait de sortir des lieux touristiques et d’aller visiter des lieux saints sans quoi, nous aurions manqué quelque chose. Cela nous a donné la chance de voir la vraie facette des Birmans. Ils sont souriants, polis, chaleureux et serviables. Ça donne envie de revenir pour découvrir d’autres parties du pays. Qu’en penses-tu?

– Ouais. Il y a une partie du nord que j’aimerais explorer, mais aussi le Sud, pour les plages qui sont apparemment magnifiques. Je pense que nous ne devrions pas trop tarder. Souviens-toi des commentaires des voyageurs qui étaient surpris par les différences avec leur précédent séjour. Le Myanmar s’ouvre au tourisme, pour notre plus grand plaisir, mais l’appât du gain peut avoir des effets dévastateurs. Nous avons d’ailleurs senti la différence entre les zones plus touristiques et celles où très peu de foreigners mettent les pieds. Le Myanmar semble encore préservé du tourisme de masse, ce qui ajoute à son charme, mais l’invasion ne saurait tarder…

En y réfléchissant, je trouve que c’est quand même un peu paradoxal : ça fait plus de trois mois qu’on voyage, qu’on est des touristes et comme tous les autres touristes, on se fuit entre nous parce qu’on sait qu’on est des plaies, parce qu’on recherche une expérience authentique, la saveur locale. En même temps, quand on se retrouve dans des trucs trop roots, on fini par avoir besoin d’une pause des lits-pas-lits qui sont à peine une couverture un peu épaisse posée au sol, des curies au poisson séché et des bécosses squat à 400 mètres dans les bois. On recherche alors des endroits qui répondent à nos critères de touristes, comme tous les autres et finalement, on se retrouve la plupart du temps dans les ghettos de foreigners. Pour les mêmes raisons, c’est difficile de se lier d’amitié avec les locaux. On bouge tout le temps et la barrière de la langue et de la culture se fait rapidement sentir. Même quand on fait l’effort d’apprendre quelques mots, on stagne et on revient à la solution facile de parler anglais. Malgré tout, ce qui selon moi à fait la richesse de ce passage au Myanmar, ce sont les gens.

– Tu as raison. D’ailleurs, ce séjour s’est déroulé sous le signe des rencontres. Avec des patients, des bénévoles, des randonneurs et des voyageurs. Nous avons passé de bons moments avec des locaux, mais surtout avec d’autres étrangers avec qui nous avons pu partager nos expériences et nos sensations. C’est souvent plus facile de se comprendre entre touristes, il faut l’admettre. Pour ce qui est des plages, je te propose de ne pas attendre de revenir au Myanmar pour aller en voir. Ça fait un peu défaut à notre carnet de route pour le moment. Essayons de remédier à cela dans les mois à venir.

– Effectivement, je m’attendais à revêtir mon maillot de bain pas mal plus souvent, mais entre les Rocheuses enneigées, la Nouvelle-Zélande à peine sortie de l’hiver et le Vietnam en pleine saison des pluies, nous n’avons embrassé la mer qu’à Hawaï. Je m’imaginais un périple sous le signe de l’eau et je réalise que c’est finalement la montagne qui prend plus de place. On se reprend dans le Sud de l’Inde et au Sri Lanka? J’ai le goût de bronzer un peu…