C’est pendant un épisode automnal de chaleurs extrêmes que s’est déroulé le marathon de Montréal 2017. L’organisation, surprise par cet événement rarissime, a décidé d’annuler la distance marathon. On m’a donné le choix du remboursement ou de courir le demi-marathon. Pour me décider, j’ai dû faire le point sur les motivations de mon engagement dans cette course. J’en avais quatre:

  1. Courir le marathon à Montréal
  2. Avoir plus de plaisir qu’à Boston
  3. Me donner un but pour me motiver à suivre un entraînement
  4. Donner un coup d’envoi à notre voyage

Quelques jours avant l’annonce, le stress de l’événement montait déjà. Alors, en premier lieu, j’ai ressenti du soulagement. Le sort m’avait rendu service, je ne ferai finalement “que” 21 kilomètres. Mais cela ne comblait pas mes deux premières motivations. D’autre part, j’avais déjà couru trois fois le demi-marathon ici. J’étais fin prêt pour 42 kilomètres, j’avais respecté le plus possible les étapes de ma préparation, il fallait un aboutissement. J’ai donc pensé faire le demi-marathon, passer la ligne d’arrivée, ramasser ma banane, ma médaille puis repartir pour 21 kilomètres de plus. Mais des médailles et des t-shirts du demi de Montréal j’en ai déjà.

Finalement, j’ai décidé de partir seul le samedi matin pour 42,2 km. C’était de loin l’option la plus avantageuse. Gain de temps puisque je n’aurai pas à aller à l’exposition chercher t-shirt et dossard. Je n’aurai pas non plus à me rendre sur le pont Jacques-Cartier pour le départ puis à rentrer chez moi depuis le parc Lafontaine. Je partirai de chez moi pour revenir chez moi. Gain financier de 130$ (je me suis inscrit tard) que l’organisation va rembourser aux non-participants. Du côté de la logistique, il y a des fontaines et des toilettes un peu partout et les rues n’étaient pas encore bloquées pour l’événement. J’ai su dimanche que le choix météo était lui aussi judicieux. Samedi matin le temps était superbe, mais pas encore caniculaire. J’ajoute à ça l’absence de stress, le simple plaisir de sortir courir pour un beau et long parcours et le soutien de ma chérie. Je ne pouvais que me faire plaisir.

Et ça a été le cas. J’ai découvert des petits sentiers à côté du casino, croisé petits-suisses et ratons. J’ai eu quelques sourires de gens qui ont lu mon dossard “Gab made”. J’ai profité de l’ombre du Mont-Royal quand la température commençait à se réchauffer. Et j’ai eu la joie de constater que mon parcours prendrait fin avant d’arriver à ce domicile qui me paraissait encore si éloigné. J’ai bien entendu eu mon moment difficile. Entre le fleuve et le sommet du Mont-Royal, il y a un bon dénivelé qui a fait mal aux jambes et au moral. Heureusement, la descente a fini par arriver et le moral est revenu. Je suis très très heureux de cette expérience. Courir de cette façon a induit un détachement par rapport au résultat qui, j’espère, me servira pour la suite.

Pour mieux comprendre mon besoin de courir ces 42.2 kilomètres, je reviendrai sur ce que représente pour moi la préparation à cette distance. Un entraînement s’étale sur au moins 16 semaines et comporte 4 courses par semaine (5 pour les programmes les plus exigeants). Je fais aussi du yoga une fois par semaine pour bien m’étirer, améliorer ma posture et renforcer mon “core”. J’essaie de nager une fois par semaine pour muscler un peu le haut du corps. Ça fait un planning chargé. Pour tenir le rythme, il faut s’adapter. Parfois sortir très tôt ou très tard. Faire deux séances de sport dans une journée, rentrer du travail en courant, etc… Ça signifie adapter mes activités sociales à ce planning. Ne pas me coucher trop tard, ménager mon foie, manger équilibré. Un mois avant l’événement, le régime alimentaire se durcit encore progressivement. J’arrête la viande rouge et les fritures. Plus d’alcool deux semaines avant, réduction progressive des sucres et attention particulière à l’hydratation. J’oublie certainement des petits détails (les séances de massothérapie par exemple), mais voilà pourquoi je me suis entêté à courir mon marathon de Montréal à moi malgré tout.

Les quatre objectifs sont atteints. Le dernier et non le moindre étant de sonner l’heure du départ pour Jeff et Gab courent le monde.